Chrono, infos, info-saturation ?

C'est venu comment ? ... Il n'y avait pas vraiment eu une concertation, cela s'est fait doucement... Je crois bien que les enfants ont manoeuvré : après avoir suivi les prouesses olympiques de Londres, souvent en fin d'après-midi, et à la fin de l'été dernier, ils avaient mis le couvert sur la grande table en face de la télévision et condamné la minuscule table de la cuisine définitivement et uniquement pour le petit déjeuner expédié, il est vrai, en 10 minutes, pas plus. Et nous parents y avons trouvé notre compte, nous avons même décrété que désormais le dîner sera pris pendant le JT de 20h, il faut dire qu'avec l'âge, les "actus" gagnent de plus en plus de place dans nos centres d'intérêt - ou on va dire plutôt que - personnellement ! - je me laisse cannibaliser par les chaînes d'infos en continue, je suis la parfaite téléspectatrice lambda qui se nourrit, que dis-je, se drogue ! des infos planétaires.

Allez, je confesse : j'ai 4 repas radio-appli-télé-visuels quotidiens :
Le premier a lieu très tôt, en général entre 7h et 7h30 (à mon échelle, c'est tôt) quand j'ai fini d'assister au réveil et au début du petit déjeuner de mon fils et avant que ma fille ne se réveille et insiste pour que je prenne le petit déjeuner avec elle - sinon elle boude. Donc, là je lis la Newsletter du quotidien "Les Echos" (Groupe LVMH) que je reçois entre 3 et 5h du matin dans ma boîte mails, elle me permet de lire les principaux titres des rubriques France, International, Enquête, Entreprises/PME, Finance, Bourse...

Le deuxième et je change de média, Europe1, entre 8h et 8h15 où j'ai les principaux titres développés dans la matinale, au moment où je dépose en voiture et en pyjama (sic) mon fils à l'arrêt du car scolaire.

Le troisième est très variable en termes de durée et de quantité, car il peut s'étaler sur une bonne partie de la journée et en général, ce sont des petites tranches, et les jours ne se ressemblent pas selon l'endroit où je me trouve. Bref, si on transpose dans la nutrition, c'est du grignotage à longueur de journée et déconseillé. Mais cela me convient, je "mange" de tout : retour à l'écran cathodique sur CNN International, très bénéfique pour mon anglais et je suis fière de mes progrès, ou perfusion sur les flash infos d'Europe1 toutes les 60 minutes si je suis en voiture, ou encore des flash infos style "Urgent", "Dernière minute" via l'appli iPhone des "Echos", par exemple pendant les 2 premières semaines de la guerre au Mali ou la libération/le retour de Florence Cassez.

Le quatrième repas, c'est le fameux et désormais rituel dîner-JT de 20h : on était perfusé à celui de TF1 les premiers mois de 2011, et depuis la rentrée de septembre, on est abonné à France2. Mon fils connaît par coeur la construction du JT et les phrases de transition éternelles de David Pujadas, genre "Il est 20h15, restez avec nous, à suivre..." !

Voilà les principaux repas, les 4, mais ne devrais-je pas mentionner le "digestif" que je prends de temps en temps : les premiers 5-6 titres de l'édition J+1 des "Echos" qui "tombent" dans ma boîte mails ponctuellement vers 22h30 cinq jours sur sept ?! Ou encore les pseudo-actus sur la page d'accueil de tel site Internet ou tel autre ? Ou les titres que le réseau LinkedIn me suggère compte tenu des centres d'intérêt que j'ai déclarés ?

Je disais donc... On s'est autorisé en connaissance de cause et dans l'entière conviction des bienfaits à récolter que le dîner sera bercé par le JT, mais hors de question de subir ! Non !! On va en faire un outil d'apprentissage aux enfants, aucun sujet n'est tabou, on répond à toutes les questions abordées par le présentateur. C'était le Pacte ! Et je dois dire qu'on s'y est tenu. Au début, on était dépassés : les questions fusaient, mais on s'est promis de tout expliquer avec des termes qui leur sont accessibles, tout y passait : politique française et internationale, les guerres, la drogue, les sujets de société divers, les faits divers, la culture... J'avoue l'immense satisfaction que je ressens quand mon fils me sort le nom de la ministre de la santé française ou de la culture, ou de la Défense - il les connaît presque tous, du moins les plus médiatiques - il ne connaît pas les ministres malgaches but he is a global kid, isn't he? Ou quand ma fille citait tous les candidats aux dernières éléctions présidentielles françaises ; ou quand ils nous posent des questions sur le Mali, la Syrie, quand mon fils dit "J'aime bien Obama". Des fois, cela vire à un exercice d'équilibrisme car on veut écouter soi-même et comprendre ce qui se dit, mais on s'est engagé à leur répondre et à tout expliquer, à la demande. Comment faire comprendre la notion d'OGM en 2 minutes ? Comment résumer le terrorisme et l'intégrisme en 2-3 phrases ?

Et souvent, on a droit à des bons petits moments comme ce soir :
2 thèmes qui se suivent : les antibiotiques deviennent moins efficaces - et - les bactériophages, ces virus qui mangent les bactéries et les recherches y afférentes. Dans son explication, mon mari rebondit sur le mot "phage" et fait un jeu de mots :
"les phages mangent les bactéries mais aussi, le temps > chronophage".
Je comprends et rigole, mais pas les enfants. Donc, on doit expliquer "chronophage" et on bute sur le mot "chrono-" : vient-il du grec ou du latin ? oh plutôt du grec mais un doute subsiste... Mon fils s'écrie :
"Ouais, chrono veut dire "temps"!".
Ignare en langues anciennes, je lui demande :
"Ah oui ? c'est du latin ? (car il fait du latin) vous avez appris ça ?".
Il répond
"Non, non !".
"Mais comment sais-tu alors ?"
"Ah ! c'est ma culture personnelle !"
Et toc !
On sourit et on applaudit le frimeur qui avoue une minute plus tard avoir "fait le rapprochement avec chronomètre, chronométrer...".
On a quand même exigé de lui de vérifier sur Internet (pas dans le dictionnaire, sic) et le mot vient, en effet, du grec "khronovoros".