Communication virtuelle - cela vous est-il déjà arrivé ?

Je sors de 57mn de séance de Skype avec ma mère qui est à 10 000km et me retrouve assez exténuée et ... amusée.

D'habitude, l'appel vidéo ou le chat est une occasion pour se donner quelques nouvelles, un moyen de garder un contact quasi-quotidien quand la distance est trop grande et que toute tentative de rapprochement se transforme en un parcours du combattant, un lien virtuel qui allège le sentiment parfois douloureux de l'éloignement : je vois ce visage chéri tous les jours, je remarque la nouvelle coiffure ou la fatigue, je constate un nez qui coule ou entends une voix enrouée, mais sans jamais rien pouvoir toucher.

Aujourd'hui, en plus de tout cela, nous avons eu une séance de travail ! Ma mère me donne un lien d'accès à un site Internet et pour être sûre que nous découvrons et déchiffrons la même chose, je lui propose d'aller ensemble sur le site, de part et d'autre de l'écran et... des océans ! Et je réalise presqu'instantanément que cela ne va pas être de la rigolade. Tu m'étonnes ! Je lis l'en-tête du site et demande confirmation à ma mère qu'elle voit bien les mêmes titre et principaux "onglets". Dû à la mauvaise qualité de la communication déjà, ou est-ce à cause de ma prononciation, elle comprend "anglais" - "anglais ? comment ça, anglais ? (...) ah ! ON-glet !"... Ensuite, très affirmative, elle m'assure que tel et tel termes sont marqués et non ceux que je mentionne. Je reste interdite pendant 2 bonnes minutes et en viens à douter : serait-ce possible que, rentrant le même nom de site web, on tombe sur 2 contenus différents parce qu'on se trouve dans 2 hémisphères différents ?!? Et dans la foulée je me persuade que cela est juste pas possible ! Inutile de préciser que nos voix respectives montent d'au moins une octave, l'une restant toujours aussi certaine de ce qu'elle avance et l'autre se sentant impuissante avec un léger agacement qui pointe son nez... Au bout d'une minute supplémentaire, je trouve la solution : je prends une photo de ma page avec mon smartphone, améliore la qualité de la photo, et la lui présente en collant le smartphone sur la webcam. Ouf, ça marche, je n'ai toujours pas l'explication de la différence de page d'accueil mais au moins, nous avançons car elle identifie sur la photo un titre qu'elle retrouve sur sa page d'accueil et atterrit enfin là où je suis - virtuellement bien sûr !

La lecture continue et je demande à ma mère d'ouvrir un fichier PDF se trouvant dans le coeur du document... et me rends immédiatement compte que je viens d'oublier pour la énième fois nos décalages. J'ai l'habitude de ces termes professionnels et bureautiques tandis que ma mère a découvert ce monde-là à la soixantaine. Je dis "PDF", elle cherche "PDF" et ne le trouve pas mais me lit le nom du fichier ; j'enclenche la marche-arrière pour me mettre à son niveau mais ma patience en a déjà pris un coup. Nous lisons ensemble en diagonal le contenu du fichier PDF et au bout, je veux qu'elle retourne à la page précédente... aïe ! Je lui demande de faire "page précédente". Echec ! Ma patience vient encore de dégringoler de 2 marches et approche du niveau plancher. Je lui suggère de chercher la flèche bleue en haut à gauche et de cliquer dessus. Elle ne trouve pas la flèche bleue, quant à moi je réalise qu'il va falloir que je sois plus précise. Nous sommes à bout toutes les 2 et c'est elle qui arrive à détendre l'atmosphère en... éclatant de rire. Sacrée maman !! Bon allez, je nous secoue, on va y arriver. Je la guide lentement en-haut-à-gauche-de-l'écran en détachant bien ces mots-là et elle trouve enfin ! Le reste de cette séance de travail virtuelle se déroule plus efficacement, non sans lui avoir indiqué de descendre la page car celle-ci est longue et les informations, nombreuses et sans faire cela, elle ne trouvera jamais le prochain fichier que j'essaie de lui faire lire.

Bilan de la réunion en bilatéral : nous sommes arrivées à avoir les informations recherchées et pourrons prendre la bonne décision - YES !!! Je mets fin à la séance car ma mère signale que mon frère, à 11 000km d'elle, lui propose également un appel vidéo Skype. Je regarde le timer : 57:20.

Exténuée et...

... amusée car je constate que ce n'est pas forcément avec l'âge que je deviens plus patiente et plus pédagogue. Heureusement que l'amour filial me rappelle à l'ordre à chaque minute au long de cet échange et adoucit mon côté parfois rugueux. Je termine la séance en envoyant des smiley câlins à défaut de pouvoir la prendre dans mes bras...